hiver 2009-2010
L'engagement des artistes ne date pas d’hier : "Zazie,
Yannick Noah, et Bernard Lavilliers. Fervents défenseurs des enjeux écologiques, chacun vit et partage ses prises de conscience à sa mesure. Il s’agit de réunir leurs talents et d’être au
rendez-vous avec le public pour porter un message fort pour la Conférence de Copenhague."
Evoquer le talent est évidemment très étrange et problématique quand on parle de Zazie ou Noah ; s'il est proportionnel à l'argent qu'il gagne en commettant leurs concerts peut-être qu'alors on peut dire qu'ils en ont… Mais on sait (ou bien on ne sait pas !) qu'une chose ne vaut pas que par sa valeur d'échange ; en l'occurrence, la valeur d'usage - c'est à dire quelque chose qui reste affectée à la chose elle même indépendamment de son prix - est bien sûr dans ce cas à peu près nulle. On comprend que tout soit dans l'emballage, il faut bien que ces canards-là soient entendus et qu'ils fassent parler d'eux d'une manière ou d'une autre pour que leur valeur d'échange grimpe et que leurs poches (et celles de leurs producteurs) se remplissent. Leur fond de commerce étant la contestation et l'image non conformiste du chanteur un brin engagé (1), ils récoltent là où leurs producteurs ont investi.
Plus fondamentalement, la fonction essentielle de tous ces gens est d'être "regardés", "contemplés", "adulés",
d'accaparer l'attention. Le spectateur doit s'oublier devant le fétiche ! le "fan" n'est pas que le spectateur de son idole, il l'est surtout de sa vie sociale qu'il ne peut plus que contempler.
Les relais de cette situation d'extrême aliénation sont multiples et les organisateurs du spectacle de la contestation comme Greenpeace (qui n'est pourtant pas le pire en la matière !) ne se
trompent pas : "Pour Karine Gavand, chargée de campagne Climat pour Greenpeace, « A trois
semaines du sommet qui va décider de notre avenir à tous, ce grand rassemblement festif, « Ultimatum Climatique», vise à faire monter un peu plus la pression sur nos dirigeants et d’afficher la
mobilisation du public face à la crise climatique. Ce concert sera une occasion supplémentaire de prouver que le Sommet de Copenhague concerne vraiment tout le monde, que les changements
climatiques ne sont pas qu’une affaire d’écologistes et que les citoyens veulent faire entendre leur voix. La société civile dans son ensemble, les artistes les plus connus et toutes les ONG
françaises rassemblées autour de l’Ultimatum Climatique vont pouvoir en musique demander un vrai accord à même de sauver le climat ! »" Avec ces actions on reste
dans le spectacle et la pseudo activité de spectateur, le
peuple n'est que le pion qui ne décidera de rien mais qu'il sera nécessaire de faire valoir au bon moment pour arriver à ses fins. On a besoin du peuple pour sauver la planète ? Mais les
politiciens, eux, ne seraient-ils pas les représentants du peuple ? N'ont-ils pas déjà l'onction populaire ? Ne serait-ce donc pas là la preuve flagrante que le système est tout
sauf ce qu'il dit être : démocratique, puisque les représentants ont à ce point besoin d'être poussés aux fesses pour agir dans le sens d'une simple sauvegarde de la planète -ce serait bien le
minimum qu'ils devraient être capables de faire.
Le B-A BA de notre système est l'organisation de la passivité dans tout le tissu social. A ce point que chaque fois que les gens sont poussés à agir ils sont dès le départ dépossédés de leur propre action, se remettant toujours à quelques représentants dont ils dépendront et qui décideront en dernier ressort à leur place.
"Ce n'est pas aux
économistes, ni à des oligarchies bureaucratiques ou scientifiques, de décider de ce que nous acceptons ou pas, mais à nous même." (2)
(1) engagé évidemment dans des voies reconnues par les pouvoirs comme totalement inoffensives pour l'ordre établi.
Dans ce dommaine, il faut parler, dénoncer mais surtout ne rien changer. Si ces gens-là avaient un minimum d'honnêteté ils ne pourraient évidemment pas mener la vie qu'ils mênent...! Comme disait
Brassens : parler de paix assis sur des canons...
(2) Florian OLIVIER